Tenez bon, Sylvie Germain, ils sont devenus fous !
La polémique autour du texte de Sylvie Germain, autrice de Jours de colère proposée au bac de français, remet le cyberharcèlement et la haine en ligne au centre du débat, mais révèle un mal bien plus profond.
Résumé des faits
Jeudi 16 juin, trois dissertations et un commentaire de texte étaient proposées, au choix, aux 400 000 lycéens de première (filière générale) qui passaient le bac de français.
Ce dernier concernait un extrait d’une vingtaine de ligne du roman Jours de colère, pour lequel Sylvie Germain obtint le Prix Femina en 1989 : « Ils étaient hommes des forêts. Et les forêts les avaient faits à leur image. À leur puissance, leur solitude, leur dureté. Dureté puisée dans celle de leur sol commun, ce socle de granit d’un rose tendre vieux de millions de siècles, bruissant de sources, troué d’étangs, partout saillant d’entre les herbes, les fougères et les ronces. »
Le texte décrit neuf frères élevés dans les forêts du Morvan et façonnés par cet environnement particulier.
Menaces sur les réseaux sociaux
Dès la fin des épreuves, des milliers de commentaires inondent Twitter, Instagram et TikTok.
Les propos sont le plus souvent insultants, et même parfois menaçants : « Sylvie, sache que des millions de personnes te détestent », « J’ai fait du hors sujet par ta faute, ton texte il tournait en rond », « J’espère que t’es en fin de vie parce que je vais pas avoir la moyenne », « On va se donner rendez-vous dans la forêt nous aussi Sylvie tu vas voir ».

Réponse de l’intéressée
Mardi 21 juin, Sylvie Germain répondait ainsi dans les colonnes du Figaro étudiant : « Je ne suis qu’un prétexte, je ne me sens pas concernée personnellement. Je suis plutôt inquiète du symptôme que cela révèle. » « C’est grave que des élèves qui arrivent vers la fin de leur scolarité puissent montrer autant d’immaturité, et de haine de la langue, de l’effort de réflexion autant que d’imagination, et également si peu de curiosité, d’ouverture d’esprit ».
Un problème récurrent
Le cyberharcèlement et la haine en ligne ne sont pas des phénomènes nouveaux, mais ils ont tendance à augmenter, notamment chez les plus jeunes.
Les causes sont toujours les mêmes : l’anonymat qui régit l’utilisation d’internet, une toute-puissance induite par la diffusion instantanée et massive sur les réseaux sociaux et le fameux effet cockpit (un pilote de chasse, protégé et très éloigné de sa cible, ne peut se rendre compte des dommages qu’il a occasionné).
Un mal plus profond
L’affaire Sylvie Germain est également un révélateur des maux qui traversent nos sociétés : une éventuelle et/ou relative baisse du niveau scolaire, un effondrement de la lecture face au temps passé devant les écrans, un narcissisme amplifié par les réseaux sociaux et l’avènement d’une sorte de génération clash, banalisant les paroles violentes et insultantes.
Relativisons
Pour clore le débat, rappelons que ce flot d’insultes et de menaces reste minoritaire par rapport au nombre de candidats ayant passés l’épreuve.
Qu’il est aujourd’hui équilibré, voire dépassé, par les messages de soutien à Sylvie Germain.
Et enfin, qu’il aura permit de découvrir, ou redécouvrir, cette très grande dame des lettres françaises.
Rosa Tandjaoui.
Codevelle
Ayant passé l'épreuve...svp à votre disposition
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