Jim Henson, père du Muppet Show !
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Jim Henson, père du Muppet Show !

Hakim Aoudia - Publié le

Temps de lecture : 17 minutes

Artiste de génie, touche à tout et créateur du fameux Muppet Show, Jim Henson a révolutionné l’art de la marionnette. 32 ans après sa mort, son œuvre a toujours autant d’influence sur la pop culture.

Un agent de changement social

En juin 2018, le Skirball Cultural Center de Los Angeles organisait une grande exposition consacrée à Jim Henson. Bethany Montagano, commissaire de l’exposition, déclarait : « Au Skirball, nous recherchons des expositions qui cultivent la compassion et inspirent l’empathie. Nous avons vu en Jim Henson un agent de changement social. Il se trouve, simplement, que ses ambassadeurs sont en feutre ! »

L'exposition Jim Henson au Skirball Cultural Center de los Angeles en 2018
L’exposition Jim Henson au Skirball Cultural Center de los Angeles en 2018. Crédit Photos Robert Wedemeyer. (Jim Henson, père du Muppet Show !).

Derrière sa galerie de marionnettes multicolores, symbole d’une nation colorée et multiculturelle, Jim Henson prenait déjà, dès les années 60, le contre-pied d’une société sclérosée pratiquant la ségrégation et annonçait l’Amérique et le monde à venir.

Un pur produit du Washington bourgeois

Les parents de Jim, Paul Henson et Betty Brown, se rencontrent au milieu des années 20, à l’Université du Maryland. À l’époque, Paul est un étudiant en agronomie et Betty, une secrétaire fraichement embauchée par l’Université.

Très vite le couple devient inséparable. Ainsi, ils battent le pavé du campus la semaine et participent aux parties de tennis régulièrement organisées le week-end.

En juin 1930, Paul est diplômé après avoir soutenu sa thèse et le couple se marie le 27 décembre 1930. Ainsi, début 1931, ils s’installent à Leland,Mississippi, où Paul vient d’être nommé agronome par le Département de l’Agriculture des États-Unis.

Il faut signaler ici, le paradoxe de la situation. D’un côté, celle d’une Amérique en pleine dépression, avec ses cohortes de travailleurs jetés sur les routes, traversant le pays dans l’espoir de trouver un emploi. Et de l’autre, celle d’un jeune étudiant fraichement diplômé obtenant un poste en seulement quelques semaines.

Une passion précoce pour le cinéma

À l’automne 1932, nait leur premier enfant, Paul Ransom Henson Jr.. Et quatre ans plus tard, James Maury Henson voit le jour, le 24 septembre 1936.

Les deux frères fréquenteront la Leland Consolidated School, l’église du quartier, le dimanche. Et le cinéma The Temple, au sud de la ville le samedi.

Jim Henson enfant
Jim Henson enfant. Crédit photo. (Jim Henson, père du Muppet Show !).

Son meilleur ami d’enfance se souvient : « Jim était passionné de cinéma : des destinations exotiques, des costumes flamboyants, des cultures lointaines ; voilà ce qui l’attirait. À l’époque, nous ne rations aucun épisode de la série, l’aigle du désert. L’action se déroulait à Bagdad et le héros avait une tache de naissance ; une étoile noire sur l’un de ses poignets. Je me souviens que Jim a apporté un morceau de bouchon, qu’il a tracé dessus une étoile, qu’il a ensuite brulé. Ainsi, nous pouvions nous tatouer une étoile noire sur le poignet. Même à huit ans, Jim avait ce quelque chose que nous n’avions pas : une originalité hors du commun. »

L’amour d’une grand-mère

Mais Jim avait une autre passion : sa grand-mère maternelle, Dear. Celle-ci avait un talent certain pour tout ce qui touchait aux loisirs créatifs. Ainsin elle pratiquait le dessin, la peinture, la sculpture, la gravure, le découpage, sans oublier le fil et l’aiguille.

Jim découvrira ainsi non seulement, que deux points pouvaient faire suggérer des yeux, mais qu’on pouvait également, par leur intermédiaire, faire passer des émotions, et qu’une simple barre horizontale, transformée en oblique, laissait deviner une bouche en colère. Mais, plus important encore, Dear fut son premier public. Ainsi, elle assiste à ses premiers spectacles. Et participe à leur élaboration, en découpant, sculptant, cousant, tout un tas de matériaux de récupération. Elle lui inculquera, également, la passion de la lecture et plus que tout, une conscience de soi, doublée d’une confiance en soi, que seul l’amour inconditionnel d’une grand-mère peut engendrer.

Une passion pour la radio

La radio, jouera également un rôle important dans sa vie, dont il dira : « Les premières œuvres radiophoniques ont beaucoup compté dans mon enfance. Je me pressais, à la sortie de l’école, de rentrer chez moi pour écouter les émissions de l’époque. »

C’est aussi grâce à la radio qu’il découvre le célèbre ventriloque Edgar Bergen et son non moins fameux compagnon, Charlie McCarthy. Dont il dira plus tard : « Je ne considérais pas ces personnages comme des marionnettes. Pour moi, ils étaient humains ! Le travail d’Edgar Bergen avec Charlie était magique. De la magie au vrai sens du terme. Quelque chose se passait quand Edgar s’exprimait par le biais de Charlie ; un sentiment de liberté : celle de laisser un personnage au bout de votre bras, dire des choses et exprimer des sentiments impossibles à assumer d’ordinaire. »

Edgar Bergen et son non moins fameux compagnon, Charlie McCarthy (1950). (Jim Henson, père du Muppet Show !).

En 1948, la famille revient dans le Maryland, où son père vient d’être muté. Le déménagement est difficile, car Jim doit abandonner son cercle d’amis. Mais il y a une énorme compensation : Dear n’est plus qu’à dix minutes à pied.

L’avènement de la télévision

À la suite de la Radio et du Cinéma, qui apparaissent à la fin du 19e siècle, une autre invention, du 20e siècle, celle-ci, va fasciner notre jeune adolescent et changer fondamentalement le cours de son existence : la télévision. À l’époque, c’est une commodité relativement récente, rare et très onéreuse. Ainsi, près de 350 000 foyers sont équipés, versus 66 millions pour la radio et un poste noir et blanc de 16 pouces vaut 250 $, l’équivalent de plus de 2.000 $ actuels. Après avoir découvert la télévision, fin 1949, chez l’un de ses amis, Jim est non seulement convaincu, mais également déterminé à obtenir de ses parents l’achat du petit écran. C’est chose faite en 1950 et il devient un spectateur assidu des quatre chaines disponibles à l’époque à Washington : « J’adorais l’idée que, ce que l’on regardait, se passait ailleurs, au même moment et j’ai très vite voulus travailler pour la télévision. »

L’influence de la bande dessinée

Au début des années 50, parait également l’une de ses influences majeures ; la bande dessinée Pogo de Walt Kelly dans les pages BD du journal The Evening Star. Celle-ci met en scène la vie des habitants du marais d’Okefenokee : opossum, alligator, hibou, chien ou tortue, charmants animaux revivant à leur manière le quotidien des Américains de l’après-guerre.

Il en dira, plus tard : « Walt Kelly a créé une galerie de personnages, avec Pogo l’opossum comme figure centrale. C’est un personnage normal, ordinaire, et tout autour de lui gravitent une collection de personnages insolites. Je me suis inspiré de cette organisation pour le Muppet Show ; Kermit est Pogo, il représente l’américain moyen, et permet aux autres personnages, d’exprimer leur folie. »

Pogo de Walt Kelly
Pogo de Walt Kelly. Crédit photo. (Jim Henson, père du Muppet Show !).

Entre-temps, Paul, son frère, rejoint l’université du Maryland, tandis que Jim s’inscrit à la Hyattsville High School.

Premiers engagements

Au lycée, il intègre la troupe de théâtre. Mais est plus intéressé par la conception et la construction des décors, que par la performance des acteurs. Il rejoindra également le club de marionnettes ; participant à un spectacle basé sur l’univers de Pogo.

Fin 1952, il a maintenant seize ans et toujours la même obsession : travailler pour la télévision. Ainsi, il en profite pour passer son permis de conduire et approcher toutes les chaines et studios de télévisions locales, sans succès.

La chance lui sourit au printemps 1954. En effet, WTOP, filiale de la chaine CBS, annonce qu’elle recherche de jeunes adolescents maitrisant la manipulation des marionnettes pour un futur programme pour enfants.

L’embryon du Muppet Show

Il emprunte à la bibliothèque les ouvrages de Marjorie Batchelder et Sergei Vladimirovich Obraztsov, marionnettistes influents de l’époque et va ainsi créer l’embryon du Muppet Show, avec comme personnage central : Pierre le rat et passer l’audition de WTPO avec succès.

Dès la fin juin 1954, alors qu’il vient d’être admis à l’Université du Maryland, il enchaine les tournages pour le Junior Morning Show.

Pierre le rat, The Junior Morning Show
Pierre le rat, The Junior Morning Show. Crédit photo. (Jim Henson, père du Muppet Show !).

Très vite remarqué par James Kovach, producteur à WRC-TV, filiale de NBC, il rejoint les programmes jeunesse de cette dernière, travaillant avec Mike Hunnicutt et Joe Campbell, présentateurs vedettes de l’époque.

Une rencontre décisive

Parallèlement, il se rend compte qu’il a été mal orienté. Préparant un master en Beaux-Arts, il découvre que les matières qui l’intéressent le plus : la décoration, le design, la mode et la publicité font partie du cursus Arts pratiques : « Je me suis donc réorienté en Arts pratiques et me suis retrouvé dans des amphithéâtres où il y avait, six garçons pour cinq cents filles. C’était merveilleux ! »

L’une de ces cinq cents filles était une brillante étudiante en éducation artistique de vingt ans nommée Jane Nebel, qui l’impressionna par ses talents de marionnettiste ; à tel point qu’il la fit recruter dans son équipe, au sein de WRC-TV.

À cette période, dans les rubriques télévision du Washington Post, apparait pour la première fois le terme Muppets, combinaison de marionnettes (en français) et de puppets (marionnettes en anglais).

Leur propre émission

Au printemps 1955, WRC-TV propose à Jim et Jane de créer leur propre émission.

Sam and Friends est un programme court de cinq minutes diffusé le vendredi à 23h25, entre le journal du soir et le fameux The Tonight Show de Steve Allen (l’émission existe toujours et est aujourd’hui présentée par Jimmy Fallon depuis 2014).

Jim Henson et Jane Nebel avec leurs marionnettes autour de 1955
Jim Henson et Jane Nebel avec leurs marionnettes autour de 1955. Crédit photo. (Jim Henson, père du Muppet Show !).

La première a lieu le 5 mai 1955. Beaucoup plus libres que sur les émissions pour enfants de l’après-midi, ils vont construire leur show autour de Sam, un personnage humain chauve, avec un énorme nez en forme d’ampoule, des oreilles noueuses et des yeux écarquillés ; lui donnant un air éternellement surpris. Les amis de Sam sont plus abstraits, aux traits plus flous, mais aux couleurs éclatantes. Un antihéros ordinaire, aimable, calme, entouré de compagnons complètement fous, dont une grenouille verte nommée Kermit : le Muppet Show était en route.

Une opportunité

En janvier 1957, le succès se confirmant, l’émission se voit accorder une tranche horaire supplémentaire à 18h50, juste avant les informations de début de soirée, puis sa diffusion est étendue à cinq jours par semaine ; ce qui fait de Jim un jeune homme très occupé.

Il est surtout conscient de l’énorme opportunité qui lui est offerte : deux spectacles quotidiens sur lesquels, il a une liberté de création complète, et décide de limiter sa présence à l’université au strict minimum, pour se consacrer entièrement à la télévision, statuant qu’il apprendrait beaucoup plus dans les studios de la WRC, que dans les amphithéâtres de l’université.

Voler de ses propres ailes

Avec des revenus de plus en plus réguliers et des Muppets de plus en plus demandés, ils signent un contrat exclusif pour la réalisation des publicités de la marque de café Wilkins.

De plus, Jim et Jane décident de passer à l’étape suivante et crée leur propre entreprise, la Muppet Inc. en 1958.

Jim a une autre idée en tête : une autre sorte de contrat, qui scellerait le lien, pour l’instant professionnel, qui l’unit à Jane : « Nous travaillions ensemble depuis plus de quatre ans. Nous avions développé une capacité à nous comprendre sans parler. Chacun savait ce que l’autre pensait, intuitivement. »

Il fera donc sa demande et le couple se mariera officiellement, le 28 mai 1959.

Former une équipe

Jane confiera plus tard : « C’était plus une proposition commerciale qu’une proposition de mariage (Rires). Une sorte d’accord, dans lequel le travail primait sur tout le reste. Ce que je peux dire à propos de Jim et de moi-même, c’est qu’il est un leader naturel, alors que je préfère rester dans l’ombre. »

En 1961, avec deux enfants en bas âge, Jane choisit de s’éloigner du monde du spectacle et Jim devra très vite la remplacer.

La même année, lors d’une convention de marionnettistes, en Californie, il rencontre le jeune Frank Oz, âgé de dix-sept ans, qui deviendra son plus proche collaborateur : « Il vivait encore chez ses parents et n’était pas prêt à quitter le cocon familial. Mais nous en avons parlé comme d’une idée. Et cette idée, comme une graine, a germé, grandi, s’est épanouie, aboutissant à l’une des plus remarquables associations du monde du divertissement. »

Un nouveau personnage

En 1962, il crée le personnage de Rowlf le chien, qui deviendra le personnage principal de spots publicitaires pour la marque Purina Dog Chow.

Franck Oz, Jim Henson et Rowlf le chien
Franck Oz, Jim Henson et Rowlf le chien. Crédit photo. (Jim Henson, père du Muppet Show !).

Quelques mois plus tard, il entame une collaboration régulière avec The Jimmy Dean Show sur ABC, dont Rowlf deviendra un personnage récurrent, volant même la vedette à Jimmy Dean.

En avril 1964, six mois après la naissance de leur troisième enfant, les Henson emménagent dans une ferme à Greenwich dans le Connecticut, à une vingtaine de kilomètres de New York.

Une incursion dans le court métrage

De 1964 à 1968, tout en continuant à honorer ses nombreux engagements, Jim commence à travailler sur un court métrage.

Time Piece, paru en 1965, est très certainement l’une de ces œuvres les plus radicales.

Time Peace (1965). (Jim Henson, père du Muppet Show !).

Ce court métrage expérimental de neuf minutes, véritable réflexion philosophique sur les origines, le temps, la vie, la mort, l’argent, la sexualité, l’art, le spectacle, la technologie, où Jim se met lui-même en scène, est un véritable choc. D’abord sonore (usage de polyrythmies jazz et d’effets acoustiques, la bande-son étant confiée à l’arrangeur de jazz Don Sebesky), puis visuel (utilisation de montages percussifs et de récurrences graphiques), le tout mijotant dans un humour noir teinté de surréalisme.

La première a lieu au Moma de New York en mai 1965 et le film obtient, l’année suivante, l’Oscar du meilleur court métrage de fiction.

Un projet fou

Entre 1965 et 1968, il travaille également sur un projet d’une ambition folle très inspiré de la mouvance hippie : Cyclia.

Il s’agit d’un concept hybride et futuriste, mêlant club et salle de spectacle, dont les murs, le sol et le plafond seraient composés de panneaux, sur lesquels seraient projetés des films en rapport avec la musique diffusée, immergeant les clients dans une atmosphère onirique. À intervalles réguliers, une danseuse-écran, juchée sur son piédestal, apparaitrait, au milieu de la salle, d’une trappe située dans le sous-sol, vêtue d’un juste au corps permettant, également, la projection de films.

Dessin de Jim Henson pour le projet Cyclia
Dessin de Jim Henson pour le projet Cyclia. Crédit photo. (Jim Henson, père du Muppet Show !).

Il créera Cyclia Entreprises en 1967 et malgré les difficultés à trouver des investisseurs et un emplacement restera très longtemps attaché à ce projet, qui sera finalement abandonné en 1970.

La naissance de Sesame Street

À l’été 1968, il décide de changer le nom de son entreprise et Muppets Inc. devient Henson Associates.

En 1969, il est contacté par Joan Ganz Cooney, célèbre productrice de programmes télévisés pour enfant, qui à travers son organisation à but non lucratif CTW souhaite : « Créer une émission de télévision à succès qui changerait la vie des enfants, en particulier, ceux des quartiers défavorisés, tout en les préparant à rejoindre les rangs de l’école. »

Vous l’aurez compris, Sesame Street venait de naître et devait remplacer sur le mode ludique l’école maternelle payante aux États-Unis et donc non accessible aux enfants pauvres.

Sesame Street, épisode 16 (1969). (Jim Henson, père du Muppet Show !).

Jim utilisera, bien sûr, Kermit la grenouille, sa marionnette fétiche, mais créera d’autres personnages qui deviendront mythiques : le duo inséparable, Ernest et Bart (Ernie and Bert), le gentil monstre, Macaron le glouton (Cookie Monster) et bien d’autres.

Se consacrer aux marionnettes

La famille s’agrandit en décembre 1970, avec l’arrivée de son cinquième et dernier enfant, Heather.

Au début des années 70, avec le succès grandissant de Sesame Street, il décide de se consacrer exclusivement aux marionnettes et de laisser derrière lui les courts métrages, les publicités et les projets avant-gardistes : « C’était ce que le public voulait et j’ai senti que je devais m’y consacrer à plein temps. Les Muppets ont toujours eu leur vie propre et nous, qui les faisons vivre, en réalité, ne faisons que les servir. C’est une entité que nous ne maitrisons pas, ni le public, d’ailleurs. C’est comme un courant, un flux ; naturel, vivant, que l’on est obligé de suivre. C’est tout simplement merveilleux, et j’espère que cela continuera, longtemps. »

La naissance du Muppet Show

Jim rêve maintenant d’un show indépendant pour adultes, dont les Muppets seraient les vedettes et réalise un pilote pour la chaîne ABC, intitulé The Muppet Nonsense Show en 1974.

En 1975, alors qu’ABC tergiverse, Lew Grade producteur britannique et propriétaire de la chaîne de télévision ITV, fan inconditionnel de Jim Henson, lui fait une proposition qu’il ne peut refuser, à condition que les tournages se fassent en Angleterre.

Direction Londres

La Henson Associates embarque joyeusement pour Londres, le 05 mai 1976, à bord du Queen Elizabeth 2.

Lew Grade respecte ses engagements : le studio D, meilleur studio de Londres, des salles de montage, des entrepôts, des bureaux, le tout magnifiquement aménagés et équipés des dernières technologies.

Considérant la musique comme une part importante du show, Jim disposera, également, de l’orchestre de la chaîne, formé à l’époque des meilleurs musiciens studio d’Angleterre.

Le premier épisode sera diffusé le 25 septembre 1976, inspiré du Vaudeville et présenté par Kermit, il met en scène une galerie de personnages hauts en couleur : Miss Piggy, le grand Gonzo (Gonzo the Great), l’ours Fozzie (Fozzie Bear) ou Animal.

Une organisation bien rodée

Une semaine type commençait le dimanche à 10h00, lorsque l’équipe au complet. Scénaristes, marionnettistes et musiciens se réunissaient pour une première lecture du script et une répétition de toutes les chansons, en présence de l’invité.e du show.

Le lundi, qu’on surnommait affectueusement le Band Day, était exclusivement consacré à l’enregistrement de toutes les bandes sons de l’émission, y compris vocales.

Le mardi était consacré au tournage des prises avec l’invité.e, tandis que le mercredi et jeudi à celles des Muppets.

À la fin de chaque enregistrement, Jim, l’invité.e et une bonne partie de l’équipe, allaient diner au restaurant.

Le succès est immédiat et foudroyant. Même Lew Grade est impressionné : « Il y a une atmosphère électrique et une excitation particulière lors de l’enregistrement de ces shows, et en très peu de temps, nous avons eu un grand nombre de vedettes réclamant de participer à l’émission. »

La reconnaissance

En août 1976, alors qu’une quinzaine d’épisodes sont déjà enregistrés, Jim retourne à New York et entre immédiatement en studio pour travailler sur les nouveaux sketchs de Sesame Street. De plus, il reçoit deux Emmy Award et honore de sa présence : The Merv Griffin Show, The Dinah Shore Show et The Tonight Show.

Les Muppets sont partout. À la télévision, dans les journaux télévisés, les journaux papier, la radio, tout le monde en parle. Alors qu’il n’en était qu’à leur deuxième saison, 125 millions de personnes dans 103 pays avaient déjà vu le programme.

Le Muppet Show, générique. (Jim Henson, père du Muppet Show !).

L’émission sera diffusée jusqu’au 15 mars 1981 ; 120 épisodes seront enregistrés, avec des invité(e)s aussi prestigieux que : Charles Aznavour, Shirley Bassey, Liza Minnelli, Roger Moore, Rudolf Nureyev, Diana Ross, Paul Simon, Dizzy Gillespie, Elton John, Gene Kelly, etc.

De nouveaux projets

En 1979, il crée la Jim Henson’s Creature Shop, atelier de marionnettes, de personnages et créatures en animatronique. Cette dernière fournira des créations pour un grand nombre de films et de séries télévisées, telles que la plante carnivore du film La Petite Boutique des horreurs et certains costumes du film Les Tortues Ninja.

La petite boutique des horreurs (1979). (Jim Henson, père du Muppet Show !).

En éternel insatisfait, repoussant toujours les limites et voulant passer à autre chose, Jim décide de conquérir le cinéma et de faire un film.

Alors qu’il pense déjà à réaliser un long métrage des Muppets (Les Muppets, le film, réalisé par James Frawley sortira en 1979), il réfléchit également à un projet cinématographique qui serait une sorte de prolongement du Muppet Show.

La genèse de Dark Crystal

En 1975, la lecture d’un recueil de poèmes de Lewis Carroll, illustré par Leonard B. Lubin, dont l’un des dessins met en scène des crocodiles revêtus de vêtements et de bijoux luxueux, lui inspire les personnages des Skeksès, créatures hybrides entre oiseaux et dragons.

Illustration de Leonard B. Lubin pour l'édition de 1975 de The Pig-Tale de Lewis Carroll
Illustration de Leonard B. Lubin pour l’édition de 1975 de The Pig-Tale de Lewis Carroll. Crédit photo. (Jim Henson, père du Muppet Show !).

Il décide donc de faire un film de Fantasy, réalisé uniquement avec des marionnettes et devant l’immensité de la tâche partage la coréalisation avec Frank Oz.

Il confie l’écriture du scénario à David Odell, avec lequel il avait déjà collaboré sur le Muppet Show et demande en parallèle à l’illustrateur Brian Froud, auteur de l’album Faeries, best-seller aux États-Unis à l’époque, de concevoir l’univers graphique du film.

Dark Crystal évoque la grande histoire de l’humanité, à travers ses mythes passés. L’éternel combat du bien contre le mal, au travers de la lutte opposant les redoutables Skeksès aux paisibles Mystiques, pour le contrôle d’un cristal magique.

Un projet titanesque

Le projet est pharaonique. Jim investit toute sa fortune personnelle dans sa conception, car nous sommes bien avant l’avènement de l’animation numérique et tous les personnages sont des marionnettes, qu’il fallait fabriquer une à une et à la main.

Il embauche à cet effet, la talentueuse sculptrice Wendy Midener, avec laquelle il a collaboré sur le tournage de L’Empire contre-attaque, deuxième opus de la saga Star Wars, à la demande de George Lucas, partageant son savoir-faire lors de l’élaboration du personnage de Yoda.

Un tournage dantesque

Le tournage a lieu dans les studios de Humpstead, près de Londres et dure un an et demi.

Jim recherche des mimes capables d’animer les personnages et de diriger les chorégraphies de marionnettes. En 1979, il engage le mime français Jean-Pierre Amiel. Ce dernier est chargé d’auditionner près de 1500 personnes, d’en retenir une cinquantaine, puis il passera huit mois à les former et entraîner. Ainsi, les personnages principaux du film étaient animés par cinq personnes cachées à l’intérieur de chaque marionnette ; se coordonnent à l’aide de petits écrans de contrôle. L’animation d’une dizaine de personnages mobilisait à elle seule une cinquantaine de personnes.

Tous les décors seront reconstitués à la taille naturelle, à l’exception du château pour lequel on utilisera une maquette. Outre l’animation des personnages principaux, la faune et la flore présentes dans chaque décor seront animées par des personnes cachées en dessous.

The Dark Crystal (1982). (Jim Henson, père du Muppet Show !).

Une période de doute

Le film sortira en 1982, recevra un accueil mitigé de la critique, un succès commercial en salle, et sera considéré dès les années 2000, comme un classique du genre.

Le tournage de Dark Crystal terminé et les studios de Londres inactifs, Jim traverse une période de doutes et de mélancolie. Les relations avec Jane se tendent et le couple décide de se séparer, sans jamais divorcer.

Jane confiera, plus tard : « Jim voulait être, à la fois, séparé et marié. Il voulait être libre, mais tenait beaucoup au fait d’avoir une famille, de rentrer à la maison pour se retrouver entouré de ses enfants. Il aurait pu demander le divorce, à tout moment, mais il ne l’a pas fait, et moi non plus. Il a toujours tout fait, pour que la famille reste soudée. »

Fraggle Rock

Au début des années 80, il travaille sur une nouvelle série pour enfants Fraggle Rock, sur le modèle de Sesame Street. Elle sera diffusée entre 1983 et 1986.

Fraggle Rock. (Jim Henson, père du Muppet Show !).

Alors qu’un deuxième film des Muppets, La Grande Aventure des Muppets, est réalisé en 1981 et qu’un troisième est en cours de réalisation (il sortira en 1984), Jim, satisfait du succès commercial de Dark Cristal, mais frustré de son accueil critique commence à travailler sur un autre projet de long métrage pour le cinéma.

Le scénario sera notamment confié au Monthy Python Terry Jones, la direction artistique à Brian Froud et George Lucas assurera la production.

Labyrinthe

Mêlant marionnettes et humains, fantasy et comédie musicale, Labyrinthe raconte l’histoire de Sarah, jeune adolescente éprise de contes de fées, qui à la suite du kidnapping de son frère Toby par des Gobelins, se retrouve dans un monde imaginaire gouverné par Jareth, roi androgyne et trouble, pour lequel elle ne peut s’empêcher d’éprouver une certaine fascination.

Il choisit, Jennifer Connelly, alors âgée de quinze ans, dont la candeur et l’innocence, feront merveilleusement contraste à l’aura de David Bowie.

Sorti à l’été 1986, le film obtient un score plutôt décevant au box-office. Mais devient culte, par la suite, notamment avec son exploitation vidéo.

Labyrinthe (1986). (Jim Henson, père du Muppet Show !).

Monstres et Merveilles

En 1987, il pose les premières pierres d’une nouvelle série The Storyteller (Monstres et Merveilles).

S’inspirant du folklore et des mythologies européennes, un vieil homme incarné par John Hurt assis dans son fauteuil au coin du feu en compagnie de son chien doué de parole, raconte de vieilles légendes : « Lorsque tombe le soir et que la nuit est noire, lorsque la lune blanche s’arrondit dans le ciel, chacun d’entre nous sait que la meilleure place au coin du feu est celle des Monstres et Merveilles… »

Neuf épisodes de 25 minutes seront diffusés à partir de 1988.

Monstres et Merveilles, épisode 1. (Jim Henson, père du Muppet Show !).

The Jim Henson Hour

En 1989, s’inspirant de Walt Disney Presents, il crée une série d’anthologies The Jim Henson Hour, dans laquelle il se met en scène pour présenter une sorte de version modernisée du Muppet Show.

Le programme ne trouvera pas son public, et seulement neuf épisodes sur douze seront diffusés, du 14 avril 1989 au 30 juin 1989, sur NBC.

Faire partie de ceux qui changent le monde

Neuf mois avant sa mort, le 16 mai 1990, d’une pneumonie bactérienne à l’âge de 53 ans, il entre en négociation avec The Walt Disney Company pour le rachat de son entreprise. L’offre est de 150 millions de $, mais sa mort interrompt les négociations.

Quelques mois avant sa mort, il écrivait : « Jeune, mon ambition était de faire partie de ceux qui changent le monde. Mon espoir reste, de le quitter, en l’ayant rendu meilleur. »

Après son décès, The Jim Henson Company sera dirigée par ses cinq enfants, qui continueront à la développer et cèderont, en 2004, les droits des Muppets à la Walt Disney Company, soit 15 ans après la première tentative pour 75 millions de $.

Hakim Aoudia.

Notre note

Les marionnettes à l’intérieur de la boutique de créatures de Jim Henson

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