Au NON des femmes de Jennifer Tamas
Entre littérature et pop culture, chasser le male gaze !
Jennifer Tamas est professeure de littérature française aux États-Unis, avec Au NON des femmes, elle signe un essai frais et réjouissant dans lequel elle montre comment la plupart de nos œuvres classiques, mais aussi nos contes de fées, sont empreints d’un male gaze, d’une image fantasmée des hommes sur les femmes. Avec ce livre, elle vise à libérer nos classiques du regard masculin qui les recouvre et à interroger leur réception.
Saviez-vous que la Belle et la Bête
était l’archétype du couple hétérosexuel problématique dans lequel la femme doit se sacrifier pour transformer la bête en homme ? Qu’à l’origine, il s’agissait d’un conte initiatique au consentement sexuel et à la découverte du désir féminin écrit par une femme et qu’il a été modifié au fil des ans et de ses réappropriations par les hommes ?
Saviez-vous que Bérénice était probablement inspirée de l’histoire d’amour contrariée entre Louis XIV et Marie Mancini ? Et que la galanterie avait été inventée par les Précieuses pour contrer le viol ?
Repartant de la polémique
qui a eu lieu lors de l’agrégation de lettres modernes de 2018, autour de L’Oaristys d’André Chenier, dans laquelle certains candidats ont perçu une scène de viol, tandis que le jury défendait qu’il s’agissait des rapports codifiés de l’époque (la fameuse feinte résistante des femmes faisant semblant de se refuser aux avances des hommes pour mieux susciter leur désir…), l’autrice en vient à se demander : que faire des œuvres jugées problématiques ? Faut-il les censurer, les recontextualiser ?
Elle propose de relire ces œuvres,
que nous connaissons toutes et tous, tels que le Petit Chaperon rouge, la Belle au bois dormant, Blanche-neige, ou encore la Belle et la Bête, Bérénice et la Princesse de Clèves, avec un regard féministe et contemporain. De quoi changer nos manières de percevoir ces œuvres et se demander ce qu’elles nous apportent aujourd’hui.

Un livre essentiel à mettre entre toutes les mains,
car il est plus qu’utile de se demander ce que nous montrerons à nos enfants, quelle vision du monde voulons-nous défendre ? Voulons-nous que les petites filles continuent de s’identifier aux belles princesses endormies, passives et prisonnières, dans l’attente d’un prince charmant censé les délivrer, afin de vivre heureux, mariés et avec plein d’enfants ?
Ne voulons-nous pas autre chose, comme des jeunes filles douées d’agentivité, capables de prendre des décisions, et de prendre part à des actions, d’avoir d’autres rêves…
Un livre accessible,
ponctué de références classiques tout autant que contemporaines, qui saura plaire aux plus jeunes comme aux plus âgés, de par ses références qui nous sont toutes et tous communes, pour construire le monde et l’imaginaire de demain.
Morgan Eschler.
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