Disparition du photographe Sebastião Salgado (1944–2025), grand maître de la photographie noir et blanc !

Disparition du photographe Sebastião Salgado (1944–2025), grand maître de la photographie noir et blanc !

Hakim Aoudia - Publié le

Temps de lecture : 4 minutes

Le 23 mai 2025, l’immense photographe franco-brésilien Sebastião Salgado s’est éteint à Paris à l’âge de 81 ans, des suites d’une leucémie liée à une malaria contractée en 2010 lors de son projet Genesis. Économiste de formation, il a consacré sa vie à capturer les réalités sociales et environnementales à travers des photographies en noir et blanc d’une puissance émotionnelle rare. Ses œuvres majeures, telles que Workers, Exodus, Genesis et Amazônia, témoignent de son engagement envers les opprimés et la nature. Co-fondateur de l’Instituto Terra avec son épouse Lélia Wanick Salgado, il a œuvré pour la reforestation de l’Atlantique brésilien. Membre de l’Académie des beaux-arts de France depuis 2016 , il laisse un héritage photographique et humaniste inestimable. Disparition du photographe Sebastião Salgado (1944–2025), grand maître de la photographie noir et blanc !

Une vocation

Sebastião Salgado est un photographe franco-brésilien. Il est né le 8 février 1944 à Aimorés, dans l’État du Minas Gerais au Brésil.

Titulaire d’une maîtrise d’économie et d’économétrie de l’université de São Paulo, il milite au sein des Jeunesses communistes. Il se trouve d’ailleurs contraint de fuir la dictature brésilienne en 1969, pour s’installer à Paris.

Recruté en 1971 par l’Organisation internationale du café, il change brutalement de carrière : « J’emportais mon appareil photo pour mes enquêtes et je me suis aperçu que les images me donnaient dix fois plus de plaisir que les rapports économiques. Je commençais à voir le monde d’une autre manière, à travers le viseur et par un contact direct avec les gens. En fait, j’ai continué à faire la même chose : dresser un constat de la réalité. »

Ce n’est, en fait, qu’un retour au militantisme : déforestation, réchauffement climatique, peuples indigènes, famine, malnutrition, exode, mouvement des sans-terre, esclavage moderne. Il témoigne des souffrances de son époque.

Indienne Yawanawa. Acre, Brésil, 2016. Crédit photos Sebastião Salgado
Indienne Yawanawa. Acre, Brésil, 2016. Crédit photos Sebastião Salgado. (Disparition du photographe Sebastião Salgado (1944–2025), grand maître de la photographie noir et blanc !).

Des choix esthétiques

Son enfance se passe dans une région écrasée de soleil. Là où, des paysages immenses s’étendant à perte de vue lui ont fait dire : « Je vivais à contre-jour ». Ceux-ci ont certainement inspirés son rapport unique à la lumière, aux ombres. Ainsi qu’à ces contrastes si caractéristiques de son œuvre.

Travaillant exclusivement en noir et blanc, il élabore une technique propre qui lui permet d’en étendre la gamme pour en extraire toute la richesse : « Je ne vois pas comment le faire en couleurs, je ne vois qu’en noir et blanc. Pour moi le noir et blanc avec toutes ses gammes de gris a plus de couleurs que toutes les photos couleur. »

Chaîne Brooks, refuge national de la vie sauvage de l’Arctique, Alaska, États-Unis, 2009 Collection MEP, Paris. Don de Sebastião Salgado et Lélia Wanick Salgado en 2018 © Sebastião Salgado.
Chaîne Brooks, refuge national de la vie sauvage de l’Arctique, Alaska, États-Unis, 2009 Collection MEP, Paris. Don de Sebastião Salgado et Lélia Wanick Salgado en 2018 © Sebastião Salgado. (Disparition du photographe Sebastião Salgado (1944–2025), grand maître de la photographie noir et blanc !).

Un témoin du siècle

De Sebastião Salgado, il restera cette empreinte rare : celle d’un homme qui n’a jamais regardé le monde de loin. Loin de la photographie-spectacle, son œuvre s’impose comme une archive sensible de notre humanité. Un travail nourri par une constance éthique et une quête de beauté parfois jugée trop parfaite. À ceux qui lui reprochaient de magnifier la douleur, Salgado répondait par la nécessité de rendre visible, et digne, ce qui est trop souvent relégué à l’ombre : la misère, l’exil, la fragilité des forêts.

Adoubé par les institutions — Prix Princesse des Asturies des Arts, Praemium Imperiale, et élu à l’Académie des beaux-arts de Paris en 2016 —, Salgado n’en est pas devenu pour autant une figure consensuelle. Il a toujours conservé cette posture de veilleur : ni moraliste, ni cynique. Simplement un homme qui, appareil à la main, s’est tenu au plus près du vivant.

Réfugiés au camp de Korem Éthiopie 1984. © Sebastião Salgado
Réfugiés au camp de Korem Éthiopie 1984. © Sebastião Salgado. (Disparition du photographe Sebastião Salgado (1944–2025), grand maître de la photographie noir et blanc !).

Un héritage

En 2014, Le Sel de la Terre, documentaire signé Wim Wenders et Juliano Ribeiro Salgado, révélait les contours plus intimes de cette vocation. Ce film, à la fois hommage et méditation, scellait une évidence : celle d’un regard qui, même en silence, continue d’interpeller.

Le Sel de la Terre – Bande-annonce. (Disparition du photographe Sebastião Salgado (1944–2025), grand maître de la photographie noir et blanc !).

Aujourd’hui, ses clichés habitent musées, livres et mémoires, mais c’est sans doute au cœur de l’Instituto Terra, au Brésil, que son legs se perpétue le plus fidèlement. Là où la terre a repris racine, où les arbres ont repoussé, et où l’espoir, méthodiquement, a retrouvé ses droits.

L’occasion de visiter la Maison Européenne de la Photographie (MEP), au cœur du Marais à Paris, qui dispose d’une exceptionnelle collection de plus de 400 tirages du photographe. Pour finir, sachez que le Centre Pompidou dispose, pour sa part, d’une vingtaine de tirages.

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Hakim Aoudia.

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