L’aliénation des femmes au travail : la culture comme émancipation !
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L’aliénation des femmes au travail : la culture comme émancipation !

Hakim Aoudia - Publié le

Temps de lecture : 6 minutes

Pour cette semaine placée sous le signe des luttes pour les droits des femmes, chez CulturAdvisor, nous proposons la culture comme antidote à l’aliénation. L’art contre le désespoir. Nous avons choisi de balayer le large champ du culturel et de l’artistique à travers des protagonistes féminines. Quand la question du travail, ce qu’il nous fait, ce qu’il nous coûte et la place qu’on lui consacre individuellement et en tant que société, est au cœur du débat public, c’est à nous d’ajouter notre pierre à l’édifice : et si les réponses se cachaient dans l’art et la culture ?

Ces derniers mois, la France a été secouée par le débat autour de la réforme des retraites voulue par le gouvernement et sa majorité au parlement. Demain, le 7 mars, le mouvement social qui s’y oppose appelle à une mobilisation massive : une grève reconductible en vue de bloquer la production du pays pour forcer le gouvernement à écouter les revendications du peuple et s’y plier. En effet, selon les nombreux sondages réalisés depuis l’annonce de cette réforme, plus de 70% des Français-es sont opposés à la réforme qui entend décaler l’âge de départ à la retraite à taux plein à 64 ans, avec 43 années travaillées. La réforme prévoit aussi de supprimer les « régimes spéciaux », qui permettent d’adapter les régimes de retraite aux spécificités liées aux différents métiers qui composent le monde du travail aujourd’hui en France.

RETRAITES : LA DROITE EN RÊVAIT, MACRON L’A FAIT. (L’aliénation des femmes au travail : la culture comme émancipation !).

Ce que la réforme fait aux femmes

Si vous avez suivi ces débats, vous avez peut-être entendu le gouvernement affirmer dans les premiers temps que cette réforme serait bénéfique pour les femmes. Il leur a été rapidement opposé cet argument : c’est une réforme délétère pour les femmes !

En quelques points :

  • Aujourd’hui 40% des femmes qui partent à la retraite ont une carrière incomplète contre 1/3 des hommes. Or, le chiffre annoncé par le gouvernement de revalorisation de la retraite minimum de 1200€ est incorrect et ne reflète pas la réalité, puisqu’il s’agit d’abord de 1200€ donc plutôt 1100€ net et qu’il ne pourra être atteint que par les personnes ayant eu une carrière complète, sans trous, à temps plein et toujours au SMIC. Pour atteindre l’augmentation prévue, les femmes devront donc travailler en moyenne 8 mois de plus qu’avant la réforme contre 4 mois pour les hommes.
  • Le gouvernement a annoncé fièrement que la réforme amènerait l’âge de départ sans la décote à 67 ans. Rien de changé donc, car c’est déjà le cas aujourd’hui. Or, aujourd’hui, on sait que 19% des femmes travaillent jusqu’à 67 ans contre seulement 9% pour les hommes. La réforme ne semble donc qu’accentuer les inégalités…
  • Enfin, le gouvernement se targue d’agir en faveur de la retraite des mères en faisant compter les congés parentaux dans les trimestres travaillés pour les femmes ayant eu une carrière longue. Pourtant, les carrières longues ne concernent que 2000 à 3000 femmes, une goutte d’eau quand on sait que ce sont 400 000 femmes qui partent à la retraite chaque année. De plus, la validation de trimestres en plus pour les femmes pour chaque enfant passe, avec la réforme, de deux ans par enfant à 6 mois par enfant.
RETRAITES : UNE RÉFORME ENCORE PLUS INJUSTE POUR LES FEMMES. (L’aliénation des femmes au travail : la culture comme émancipation !).

Ce que le travail coûte aux femmes

En réalité, derrière les débats déclenchés par cette réforme, c’est tout le monde du travail qui est remis en question par une majorité de Français-es, et surtout parmi les plus jeunes. Dans un monde de plus en plus violent, dans un pays qui fait partie des 5 plus grandes puissances mondiales, mais où les inégalités se creusent chaque jour un peu plus, ajoutez à cela la crise écologique majeure qui menace nos écosystèmes et tout le monde de fonctionnement de notre civilisation ; quelle place donner au travail dans nos vies ? Entre quête de sens et répartition de son temps, nombreuses sont les personnes qui questionnent la « valeur travail ». D’autant que n’est considérée comme « travail » que l’activité salariée qui est devenue petit à petit un synonyme de citoyenneté. Or, que faire du travail associatif, militant ou enfin, domestique ?

C’est ce dernier qui coûte le plus aux femmes

Encore aujourd’hui, le travail domestique représente plus de deux tiers du temps des femmes contre un tiers de celui des hommes dans le cadre de couples hétérosexuels installés en ménage. Ce temps consacré au soin du foyer, du conjoint et des enfants freine bien souvent leur avancée professionnelle. Par ailleurs, l’écart de salaire entre les hommes et les femmes est toujours d’environ 22%. Entre l’effet « plafond de verre », c’est-à-dire que plus on monte haut dans la hiérarchie des postes, moins on trouve de femmes ; les cas encore trop fréquents où à diplômes, postes et temps égaux, les hommes touchent en moyenne 5% de plus que leurs homologues féminines. Les femmes sont également celles qui exercent le plus les métiers à temps partiel et ceux qui sont les moins valorisés, comme tous les métiers du care.

Réforme des retraites : qui sont les grands perdants ? (L’aliénation des femmes au travail : la culture comme émancipation !).

Un mouvement social massif…

Pour toutes ces raisons, il semble inévitable que les luttes féministes et les luttes syndicales se rejoignent. La réforme des retraites avait déjà été annoncée en 2019 par le gouvernement d’Édouard Philippe et avait déclenché un mouvement d’ampleur mené principalement par les cheminots et les employé-e-s de la RATP, commencé le 5 décembre. La crise du COVID a retardé les projets de l’équipe présidentielle. Depuis l’annonce en janvier 2023 de la reprise de cette réforme, l’importance du mouvement social bat des records. Les syndicats annoncent près de 2 millions de manifestant-e-s le 19 janvier, ce qui en fait la mobilisation la plus forte des trente dernières années ; et 2,5 à 2,8 millions de manifestant-e-s pour le 31 janvier. Les observateurices de la vie politique s’accordent toustes sur le caractère exceptionnel de ce mouvement dont l’ampleur et la popularité ne font que croître à mesure que le temps avance.

… qui rejoint les luttes féministes

Malgré cela, le Président, son gouvernement et leurs députés à l’Assemblée nationale tiennent fort leur position. Une grève générale et reconductible, massive et touchant les secteurs les plus essentiels au maintien de l’activité économique semble être la seule issue. Le 8 mars, Journée Internationale de Lutte pour les Droits des Femmes, est déjà une date où de nombreuses femmes se mettent en grève pour faire valoir leurs droits et où de nombreuses manifestations ont lieu. Le Président Emmanuel Macron avait déclaré au début de son premier mandant qu’il ferait de la lutte contre les violences faites aux femmes la « grande cause de son quinquennat ». Face aux nombreuses critiques de la part des associations féministes, il a renouvelé la promesse pour son second mandat. Force est de constater que la promesse est loin d’être tenue. Et le gouvernement s’est trouvé bien obligé d’admettre que la réforme serait négative pour les femmes.

Retraites, un combat féministe : meeting contre la réforme des retraites ! (L’aliénation des femmes au travail : la culture comme émancipation !).

Alors,

face à un Président et un gouvernement qui refuse d’écouter les revendications de son peuple sur le travail et qui participe à la dégradation des droits et des conditions de vie des femmes, il est important de s’unir. Les deux mouvements ont bien compris qu’ils ont le même adversaire. De même, les luttes écologistes qui avaient déjà affiché leurs liens avec les luttes féministes depuis un bon moment, elles aussi ont fait entendre leur voix contre la réforme des retraites. Parce qu’il nous faut du temps pour vivre et pour reconstruire un monde fracturé. Prendre soin de soi, prendre soin des sien-ne-s et des autres, prendre soin de l’environnement, prendre le temps de se renseigner, de s’écouter les un-e-s les autres, de se cultiver : voilà ce qui est au cœur de ce soulèvement populaire.

Entre les conditions de travail qui se sont dégradées et les avancées sociales que nous sommes de plus en plus nombreuxes à appeler de nos vœux ; il est impératif de moins travailler.

Quelle voie d’émancipation ?

Chez CulturAdvisor, nous proposons la culture comme antidote à l’aliénation. L’art contre le désespoir. Pour cette semaine placée sous le signe des luttes pour les droits des femmes, nous avons choisi de balayer le large champ du culturel et de l’artistique à travers des protagonistes féminines. Quand la question du travail, ce qu’il nous fait, ce qu’il nous coûte et la place qu’on lui consacre individuellement et en tant que société, est au cœur du débat public, c’est à nous d’ajouter notre pierre à l’édifice : et si les réponses se cachaient dans l’art et la culture ?

Nous avons construit un parcours de portraits de femmes inspirantes, pour sonder le rapport qu’elles entretiennent avec l’art et la culture. Quel a été l’apport de ces femmes à nos cultures communes ? Comment l’art et la culture ont pu représenter un biais d’émancipation pour elles ?

Vous retrouverez cette semaine les portraits de :

  • Anne-Cécile Chapuis : cheffe de chœur de l’Ensemble Vocal Anonymus,
  • Agnès Lefranc : pasteure de l’Église Protestante Unie d’Orléans,
  • Annie Colère et Blandine Lenoir, médicalisation du corps des femmes,
  • Le château de By, musée Rosa Bonheur,
  • Notre playlist en hommage aux chanteuses de jazz,
  • Wendy Carlos, la femme derrière le synthé,
  • Portraits croisés de gameuses : le jeu vidéo et le genre,
  • Hélène Boucher, une étoile filante (1908-1934).

Nous vous souhaitons une belle semaine d’émancipation !

Lou Gasparini.

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